Trivium – The Sin and the Sentence

            S’il est un groupe qui a connu au fil des ans une évolution stylistique spectaculaire, c’est bien l’américain Trivium – ce qui fait que chaque nouvelle sortie génère attente et surprises. Il y a six jours paraissait justement The Sin and the Sentence (Le Péché et la Sentence), huitième album du groupe. Son artwork* sobre et minimaliste se compose d’un simple triangle ciselé de flammes, se détachant sur un fond d’une inédite couleur bordeaux (on était plutôt habitués au noir et blanc).

            Etonnamment, le morceau-titre de l’album figure en première position ; pour ma part, je le trouve un peu fade. S’il est rythmiquement puissant, mélodiquement il fait preuve d’une certaine faiblesse. Cette impression en demi-teinte résume plutôt bien mon avis général sur l’opus.

            Plusieurs morceaux, ou du moins certaines séquences, semblent renouer avec les influences thrash* primitives du groupe, pour notre plus grand bonheur. Cela est sensible notamment dans une série de solos de guitare virtuoses et effrénés, du morceau d’ouverture « The Sin and the Sentence » (autour de la troisième minute) à celui de clôture, « Thrown into the Fire », qui laisse la part belle au guitariste autour de 1mn50 ou de 3mn30 entre autres, et au milieu, sur les morceaux de bravoure de « Sever the Hand ».

            En revanche, on regrette les lyrics « adolescents », qui manquent cruellement de maturité, après 17 ans de carrière et alors que les membres ont atteint leur petite trentaine… Affrontement du « je » lyrique (si j’ose dire) avec le monde entier, dépression, mort, haine, trahison… Thématique un peu rebattue du mensonge social et de la condamnation du marginal… on est loin de la culture sur laquelle reposait, par exemple, The Crusade.

            Dans le deuxième titre de l’album, « Beyond Oblivion », le personnage est toujours aussi joyeusement condamné à mourir mais il faut souligner l’efficacité des chœurs accusateurs, « What have we done », qui font de ce titre l’un des bons moments de l’album.

            La variété vocale permise par le duo Heafy/Beaulieu est pleinement exploitée sur ce morceau, comme sur beaucoup d’autres : douceur de la voix de tête, émotion de la voix de corps sur l’envoûtant refrain ou voix saturée rageuse en alternance avec le chœur d’hommes sur le « pré-refrain » se complètent subtilement. Ce second morceau signe également le retour affirmé d’un metalcore* complexe et bien spécifique au groupe. Nous retrouverons les chœurs entraînants qui ont souvent fait l’efficacité des refrains de Trivium sur le quatrième titre, « The Heart from your Hate ».

            Une impression de fadeur, voire d’ennui, se dégage en revanche globalement des « Other Worlds » ou autre « Endless Night », respectivement en troisième et septième positions.

            Le cinquième titre, « Betrayer », se signale d’emblée par son énergie violente, qui reviendra régulièrement au cours du morceau, tout en blast beats* et contretemps avec une belle ligne mélodique. Nous sommes là face à un bon morceau, suivi par un « The Wretchedness Inside » presque aussi convaincant : après un début très deathcore*, que l’on retrouvera dans « Thrown into the Fire » en clôture de l’album, le titre atteint son apogée sur un excellent passage parlé à 3mn, prolongé par un libérateur « Fuck yoooou » ! (Ça, ça va plaire à un certain amateur de « flots de haine » de ma connaissance 😉…).

            Si le huitième titre, mis à part ses solos, m’accroche peu musicalement, il est à noter que les lyrics* en sont plus travaillés, autour d’une thématique (anti-)religieuse et d’une formule bienvenue : « Life burns me alive » (« La vie me brûle vif » - oui, je vous avais dit que ce n’était pas très réjouissant comme ambiance !). En neuvième place, avec « Beauty in the Sorrow », mon attention est captée par un rythme plus doux, mais justifié par une utilisation de la voix très intéressante et variée.

            « The Revanchist » me paraît en revanche profondément ennuyeux et superflu, mais cela ne tient qu’à moi.

            Nous retiendrons donc de cette production une alternance marquée d’influence thrash* et de moments metalcore* voire deathcore*, dont la simplicité reste mêlée à une technique instrumentale poussée : de bons solos de guitare, marqués notamment par une utilisation caractéristique de la distorsion*. Nous réécouterons avec bonheur « Beyond Oblivion », « Betrayer », « The Wretchedness Inside » et « Beauty in the Sorrow » mais il est possible que nous laissions de côté certains autres titres de cet album, et que nous évitions de nous concentrer sur la signification (pas très) profonde de ses textes. Pourvu que le combo ne soit pas en train de s’essouffler… « C’mon, guys! »

Trivium

Trivium

*Lexique pour maman :

- artwork : Création artistique illustrant un album.

- thrash(-metal) : Sous-genre du metal, présent dès ses débuts, caractérisé par sa rapidité, sa virtuosité et son agressivité brute (sans synthétiseurs, par exemple).

- metalcore : Sous-genre hybride de metal et de punk-hardcore, caractérisé par une simplicité mélodique et une alternance de chant clair et « screamé ».

- blast beats : Technique de batterie qui enchaîne les doubles-croches à un tempo élevé, donnant une impression de saturation du rythme.

- deathcore : (voir metalcore ci-dessus) Hybridation, plus précise que le metalcore, du punk-hardcore avec le death-metal, ce qui augmente la brutalité et l’utilisation du chant screamé ou guttural

- lyrics : texte, paroles d’une chanson.

- distorsion : Effet de saturation de la guitare électrique, caractéristique du metal, qui donne au son un grain, lui enlève sa clarté initiale.

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